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Visite chez le médecin dans la chambre d’hôpital

Les risques d'alitement prolongé

De multiples raisons peuvent entrainer un alitement prolongé, comme un accident ou encore une perte d'autonomie. or l'être humain est fait pour vivre debout, son corps est physiologiquement conçu pour la position verticale. Par conséquent, lorsque la position allongée dure, de nombreux problèmes peuvent apparaitre (escarres, phlébite...).

Il est donc nécessaire de prévenir ces différents risques en limitant le temps passé en position allongée (On parle de décubitus). Dès que l'autorisation médicale est donnée, les patients sont levés tous les jours (si besoin à l'aide d'un verticalisateur), même si c'est seulement pour aller au fauteuil. 

1 - Les escarres

Qu'est-ce qu'une escarre ?

La compression prolongée des tissus entre deux plans durs (entre la saillie d’un os et l’ossature d’un lit ou d’un fauteuil) ralentit la circulation sanguine et donc l'oxygénation des tissus qui en meurent : c’est la nécrose (mort d'un tissu).

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L'escarre se défini donc comme une nécrose cutanée d'origine ischémique (manque d'oxygénation) liée à une compression des tissus mous entre un plan dur et les saillies osseuses.

Toutes les zones d’appui en décubitus (position allongée) dorsal, décubitus latéral et position assise sont des zones exposées aux escarres.

illustrations issus de : https://www.ch-millau.fr/wp-content/uploads/2015/04/08-Prevention-des-escarres-C.-DELABRE.pdf

Les facteurs de risques d'escarre

  • La pression : qui décrit la force exercée sur la peau par le support est un facteur déterminant. Il faut tenir compte de l'intensité, de la durée et de la répétition. 

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  • Le cisaillement : qui consiste en des forces s’appliquant obliquement sur les plans cellulaires sous-cutanés, par exemple le corps en position semi-assise glissant vers le bas. Le cisaillement provoque des lésions de la micro circulation plus importantes que la pression seule. L'escarre due au  cisaillement ne se trouve pas nécessairement en regard d'une saillie osseuse.

  • La friction : frottement direct de la peau qui entraîne une lésion superficielle (Rehaussement dans le lit, massage).

  • la macération de la peau

à cela vient s'ajouter :

  • La dénutrition (signes cliniques : perte de poids > 5% en 1 mois; signes biologiques : albumine <35gr/l)

  • L'immobilité contrainte : contre indication médicale au lever, certaines pathologies (hémiplégie, paraplégie, diabète, artériopathie...)

  • Facteurs iatrogènes : certains médicaments sédatifs, matériel (sonde gastrique, plâtre ...).

  • Défaut d’éducation : méconnaissance et/ou non respect des consignes éducatives par le patient ou son entourage Insuffisance de formation des professionnels (friction trop énergique avec de l'eau de cologne, plis au niveau de la literie...)

2 - Les différents stades de l’escarre

L’escarre débutante se signale par un érythème disparaissant à la pression puis par une rougeur qui s’installe.

À ce stade, l’escarre est réversible : il suffit le plus souvent de supprimer la compression et de traiter la zone affectée avec des produits adaptés.

De la rougeur initiale à la nécrose finale, il suffit souvent de quelques heures (il suffit de 3heures) alors qu’une escarre déclarée demande plus de 2 mois pour guérir, d’où l’importance capitale de la prévention. 

Stade 1  :

La peau intacte présente un érythème (rougeur cutanée) qui ne blanchit pas à la pression.

Autre manifestation : une décoloration de la peau, de la chaleur ou une induration.

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Stade 2 :

Désépidermisation : arrachement cutané touchant l'épiderme et éventuellement le derme,

Variante au niveau du pied : la phlyctène (ou ampoule) hémorragique ou séreuse, selon qu'elle contient ou non du sang, 

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Stade 3 :

Perte de substance ou nécrose impliquant le tissu sous-cutané pouvant s'étendre jusqu'au muscle sans le léser.

Plaie profonde avec ou sans envahissement des tissus environnants.

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Stade 4 :

Plaie ouverte profonde (la profondeur varie selon la localisation anatomique).

Atteinte étendue, nécrose tissulaire et/ou lésion musculaire, osseuse ou des tissus conjonctifs (avec exposition de muscle, de tendon, et ou d'os).

On retrouve souvent des fistules associées (La fistule est un lien anormal entre deux organes ou entre un organe et la peau).

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3 - La prévention des escarres

La prise en soins de l'escarre relève de la compétence de toute l'équipe sous la responsabilité de l'infirmière.

Elle passe par : 

• Identifier les facteurs de risque,

• Diminuer la pression (changements de position),

• Utiliser des supports (choix de matériel adapté),

• Maintenir l’hygiène de la peau, observer l’état cutané, 

• Assurer l’équilibre nutritionnel (lutte contre la dénutrition et la déshydratation),

• Favoriser la participation du patient et de son entourage à la prévention des escarres,

• Assurer la continuité des soins (transmissions).

 

3.1 - évaluer le risque d'escarre

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La première mesure de prévention consiste à évaluer le risque d’escarre chez tout patient, ce qui permet de cibler ceux qui vont avoir besoin de soins de prévention et d’individualiser la stratégie de prévention en fonction des facteurs de risques repérés.

Cela passe par l'utilisation "d'échelles d'évaluation du risque".

1. L’échelle de Norton

  • Particulièrement adaptée aux sujets âgés (+ de 65 ans)

  • Rapide et simple à utiliser

  • Plus le score est bas, plus le risque d’escarre est élevé

    • score < 16 risque d'escarre élevé​

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L’échelle de Norton se base sur 5 domaines pour déterminer le degré de risque à développer des escarres pour le patient :

  • La santé mentale : Niveau de conscience et orientation (alerte, apathique, confus ou inconscient)

  • L’incontinence : degré de capacité à contrôler intestins et vessie (aucune, occasionnelle, urinaire, urinaire ou fécale)

  • L’activité : degré de capacité à se déplacer (ambulant, marche avec aide, assis, totalement aidé)

  • La mobilité : degré de contrôle et de mobilisation des membres (totale, diminuée, très limitée, immobile)

  • L’état général : statut nutritionnel, intégrité des tissus, masse musculaire, état de la peau (bon, moyen, pauvre, très mauvais)

2. L'échelle de Braden 

  • Adaptée à toutes les situations

  • Rapide et simple à utiliser

  • Plus le score est bas, plus le risque d’escarre est élevé :

    • score > 18 risque d'escarre bas​

    • score 13-17 risque d'escarre modéré

    • score < 12 risque d'escarre élevé

L’échelle de Braden permet d'évaluer 6  catégories :

- les perceptions sensorielles

- l'humidité

- le degré d'activité physique

- la mobilité

- la nutrition

- l'éventualité de friction ou de cisaillement

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3. L'échelle de Waterlow 

  • Adaptée à toutes les situations, y compris à la réanimation

  • Plus complète et plus précise

  • Plus le score est haut, plus le risque d’escarre est élevé

    • score < 10 risque d'escarre bas​

    • score 10-14 risque d'escarre modéré

    • score 15-19 risque d'escarre élevé

    • score >20 risque d'escarre très élevé

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3.2 - La mobilisation

images issus de https://www.ch-millau.fr/

La mobilisation est considérée comme étant la mesure la plus efficace dans le cadre de la prévention des escarres :

  • Alternance des positions → Alternance des zones de pression

  • Fréquence de changements de position suffisante → Hypoxie tissulaire ne s’installe pas → Pas d’escarre

Alternance des positions

  • En position allongée sur le côté à 90°  (décubitus latéral 

 strict, gauche ou droit) : Les pressions sont concentrées sur les trochanters → le risque d'escarre compliquée d'une atteinte ostéo-articulaire justifie l'interdiction  de cette position. c'est une position à haut risque.

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  • En position allongée sur le dos  (décubitus dorsal) : position semi-fowler 

Position relaxante dans laquelle l’intensité de la pression et le risque de cisaillement sont minimes.

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Attention :

  • en déchargeant une zone du corps, un déséquilibre se crée, la pression peut augmenter sur une autre zone.

  • en conséquence, il faut veiller à ce qu'il n'apparaisse pas d'escarre ailleurs.

  • importance de prévenir les escarres talonnières.

  • la décharge du talon avec des coussins trop épais peut favoriser le "flexum" de genou (Un flexum ou flessum est une perte de mobilité, permanente, ou ponctuelle d'une articulation qui s'enraidit en flexion).

  • En position allongée à 30°  (décubitus semi-latéral à 30°, gauche ou droit) : 

Les pressions sont mieux réparties → les zones du sacrum, des trochanters (hanches), des ischions et des talons sont soulagées.

 

Utiliser des coussins en mousse viscoélastique moulée ou en miettes, mousse à haute résilience moulée, fibre creuse siliconée, boudin garnis de microbilles (polystyrène ou mousse)...

  • En position demi-assise au lit  : 

En position demi-assise au lit avec le relève buste à une inclinaison supérieure à 30° :

→ la pression est davantage concentrée sur la zone du sacrum et importante aux talons.

→ le patient a tendance à glisser, les zones sacrées et talonnières subissent un important cisaillement.

DONC :

  • la position assise à 90° (​Pression maximale) est à proscrire.

  • la position semi assise à 60 ° doit être de courte durée  et doit être à limitée à des moments précis (repas) ou si nécessité (détresse respiratoire…).

  • Il est possible de placer un support entre les pieds et le bas du lit pour éviter le glissement du patient.

  • En position assise au fauteuil : 

Surface de contact la plus importante → Pression la plus basse

  • Talons ne reposent pas sur le repose pieds

  • Inconvénient : difficulté à se relever seul

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Si le dossier ne s’incline pas, la pression sera la plus basse lorsque le patient est assis bien droit les pieds reposant au sol.

(S’adapter à la taille du segment jambier du patient)

  • Manutention : 

Les phénomènes de cisaillement et de frottement lors des glissements du patient sont évités par :

  • les rehaussements à 2 soignants avec drap (diminution des frictions)

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  • l’utilisation du lève-personnes lors des transferts

Vidéo : Les techniques de mobilisation

Fréquence des changements de position

  • Changement de position toutes les 3 heures au lit sauf contre-indication médicale.

  • Favoriser le semi-Fowler, position dans laquelle les pressions sont moindres.

  • Séquence privilégiée : Semi-Fowler → Décubitus 30° droit → Semi-Fowler → Décubitus 30° gauche.

  • Si apparition escarre, décharge systématique de la zone atteinte.

  • Utiliser un outil de traçabilité pour tenir à jour les séquences.

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Préciser la date et mentionner l’heure des changements de positions du patient en utilisant les abréviations suivantes : décubitus dorsal (DD), décubitus latéral gauche (DLG), décubitus latéral droit (DLD), décubitus semi-ventral (DSV), décubitus semi-fowler (DSF), Marche (M), semi-assise 30° (SA), Assise* au lit (A), Assise au Fauteuil (F).

3.3 - Le matériel

le matériel

Après avoir évalué le niveau de risques d’escarre de la personne, il s’agira de sélectionner un matelas adapté, en tenant compte également de sa morphologie, de son poids. En effet, en fonction du type et de la classe de matelas anti-escarres, le poids maximum supporté varie :

  • Les matelas à eau ne peuvent souvent pas supporter plus de 80 kg. Au-delà, il y a des risques de crever le matelas.

  • Les matelas à air ont une résistance possible jusqu’à 135 kg.

  • Les matelas en mousse offrent un plus grand choix de portances de 100 à 180 kg.

Ainsi une personne en surpoids choisira un matelas à mémoire de forme plutôt qu’un matelas à plots, car il apporte plus de confort et s’écrase moins sous le poids. 

Les différents types de matelas médicalisé anti-escarres

Les matelas gaufriers : risques moyens d'escarres.

Système de plots en mousse de polyuréthane haute résilience

-favorisent la répartition du poids

- réduisent l’effet de cisaillement.

-évitent les effets de macération en laissant circuler l'air.

- doté d'une housse imperméable aux liquides au cas où le patient serait sujet à l'incontinence. Sa matière antiglisse assure une stabilité à la personne alitée. ( pour un maintien au lit temporaire et court)..

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Matelas anti-escarres en plaques de mousse viscoélastique (mélange de mousse et de gel) qui est dit « à mémoire de forme » : risques modérés d'escarres.

- épouse parfaitement la morphologie du patient, ce qui a pour effet d’augmenter la surface de contact et de réduire les points de pression tout en facilitant la circulation sanguine et donc prévenir la formation des escarres.

- mousse qui augmente le confort de la personne.

Les matelas à air alterné composés de poches remplies d’air avec un compresseur qui gonfle et dégonfle alternativement ces poches indépendantes les unes des autres , ce qui permet de modifier ou décharger les appuis par alternance.

Ces matelas sont préconisés pour les patients à risque moyen à élevé d’escarres.

Il convient pour les immobilisations longues propice aux escarres.

Les matelas à air fonctionnent selon deux modes différents :

  • Le mode dynamique  se caractérise par des cellules qui se gonflent alternativement de façon régulière.

  • Le mode statique permet de gonfler les cellules en fonction des mouvements de la personne.

Les matelas à air dynamique sont les matelas les plus efficaces en ce qui concerne la prévention et le traitement des escarres, car ils permettent une décharge du poids sur tout le corps.

De plus la présence d'une vanne CPR va permettre de dégonfler le matelas rapidement pour procéder à un massage cardiaque, si nécessaire.

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Matelas anti-escarres à base d’eau : l’eau a la faculté de réduire les pressions. Mais l’efficacité n’est pas optimale et il y a des risques de fuite non négligeable.

Autres matériels anti-escarres

Vidéo : Comment prévenir et traiter l’escarre au niveau des talons ou du pied?

Pour prévenir ou traiter l'escarre du talon il est important de 

Libérer les talons

répartir la surface de portance

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Pas besoin de surélever les talons trop haut  (éviter le flexum du genou et l'augmentation de la pression au niveau du sacrum).

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Placer un coussin ou oreiller sous les jambes jusqu'à l'articulation du genou pour éviter une tension ou une contracture et assurer le confort.

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Un drap roulé et placé sous le tendon d'Achille ou un gant rempli d'eau entraine une surface de contact trop petite et un risque d'escarre au niveau du tendon d'Achille.

Ce procédé est donc déconseillé

position assise au fauteuil : diminuer les pressions subies sur les zones à risques, notamment en position assise (ex. : fauteuil roulant). 

Coussins  viscoélastique à mémoire de forme

Coussins à base de gel plus ou moins fluide

coudière

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3.4 - Autres points de vigilance

autre point de viilance

La réfection du lit

  • Éviter les plis des draps qui sont source de compression et donc de gêne de la circulation sanguine.

  • Pour assurer une efficacité maximale des matelas anti-escarre, il ne faut pas border les draps sur les côtés (les draps ne doivent être bordés qu'à la tête et aux pieds).

  • Changer la position de la personne alitée toutes les trois heures afin de supprimer la compression des points d’appui.

  • L'usage d'un arceau peut s'avérer utile pour éviter le poids des draps et des couvertures sur les membres inférieurs.

  • Une potence, si le(la) patient(e) peut l'utiliser, lui permettra de soulager ses points d'appui et de se redresser seul ou avec aide.

Hygiène rigoureuse

  • toilette corporelle quotidienne, précautionneuse sur les zones à risque.

  • Les soins d’hygiène sont renouvelés lors des changes des patients incontinents et/ou qui transpirent, afin d’éviter la macération et l’irritation cutanée.

  • Les soins spécifiques visant à isoler les selles ou les urines sont à utiliser pour prévenir l’apparition de lésions cutanées (étui pénien, collecteur fécal, change).

  • Sécher soigneusement la peau lors des changes ou de la toilette car l’humidité est source d’irritation et d’escarres.

  • l'observation et la palpation de l’ensemble des zones à risques doivent être effectuées à chaque changement de position et lors de soins d'hygiène.

  • Procéder à des effleurages réguliers des points d’appui afin de faciliter la circulation sanguine et prévenir le risque.

 

  • L’effleurage consiste à favoriser la microcirculation cutanée au niveau des points d'appui (c'est-à-dire la circulation du sang dans les très fins vaisseaux sanguins de la peau).

 

  • Méthode : consiste à effleurer la peau , pendant 1 à 2 minute(s), avec la paume  dans un mouvement de rotation sans appuyer (ne pas masser) à mains nues (sans gants), à l’aide d’une huile de soin  hyperoxygénée (qui hydrate l’épiderme et renforce la résistance cutanée), éviter l’utilisation de produits alcoolisés qui dessèchent la peau et de pommades grasses qui favorisent la macération.

       L’effleurage est contre-indiqué sur les zones lésées, inflammatoires ou présentant des 

       rougeurs non réversibles.

       Le massage et la friction des zones à risque sont interdits puisqu’ils diminuent le débit 

       microcirculatoire et ont un effet traumatisant.

Alimentation adaptée 

La prise en charge nutritionnelle fait partie de la prévention et du traitement des escarres. Elle doit être adaptée pour chaque patient. Les apports protéino-énergétiques recommandés chez les patients dénutris à risque ou porteurs d'escarres sont 30–40 kcal/kg par jour et 1,2–1,5 g de protéines/kg par jour.

Transmettre les informations

Procéder à une transcription des facteurs de risque, des mesures de prévention mises en œuvre et de l’observation de l’état cutané dans le dossier du patient est utile à la continuité des soins.

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